Le premier pas, c'est toujours ainsi que commencent les voyages, par un premier pas, suivi d'une multitude d'autres qui mènent le rêveur sur des sentes détournées et des chemins de traverse. Peu importe le but, peu importe la raison, il en est toujours ainsi, quête pour la gloire et l'honneur, fuite ou voyages d'agréments, ce premier pas relis tous ceux qui empruntent les sentiers.
Son premier pas à elle, il se fit en hiver, lorsque les premiers flocons de neige commencèrent à recouvrir la terre, le dernier pas de son voyage se fit à la fin du printemps, quand la nature à finit de revêtir son manteau de verdure. Son premier pas se fit dans la cité entourée de forets de son enfance, son dernier pas se fit dans une autre cité.
Descendant de sa monture, Elenwë leva les yeux vers les hautes tours de la cité, elle touchait au but, inutile de rajouter un "enfin", après tout son voyage n'avait duré que quelques mois, temps bien dérisoire pour les immortels, ou plutôt sans réelle importance. Elle rajusta son carquois et, prenant les rênes de son cheval, avança dans les rues de la ville. Elle avait quitté sa verte cité pour venir ici, elle n'avait pas répondu à l'appel du voyage, mais à un autre, l'appel de l'érudition. C'était ainsi, elle ne se sentait bien qu'avec un livre à la main, sentir le grain des feuilles jaunies par le temps, toucher la couverture de cuir d'un lourd volume, déchiffrer les volutes d'encre noire qui s'étalaient sur les pages. Et les seuls moments où ses doigts délaissent les écritures, c'est pour se poser sur les cordes de sa harpe, la musique n'est-elle pas une autre forme d'érudition, une autre forme de communication ? Car les sentiments qui transparaissent au milieu des mots ne sont-ils pas aussi présents quand les notes s'égrainent dans le vent ?
Et c'était pour cela qu'elle avait quitté son lieu de vie, pour venir ici, espérant y découvrir de nouveaux livres, s'enivrer de musique et partager, oui partager avec les autres cette connaissance, pouvoir apprendre et effleurer de nouveaux horizons.
Bien sûr, au cours de ses centaines d'années d'existence, elle avait eu l'occasion de visiter d'autres endroits, royaumes encore en place ou tombés et oubliés par beaucoup. Et à chaque fois elle en revenait avec une montagne de livres et non pas moins de morceaux de musique. Contes qu'elle racontait alors des veillées, notes qu'elle jouait ensuite sur sa harpe sou les arbres. Partir plusieurs années ne la dérangeait guère, ne rester que quelques jours au même endroit non plus, l'elfe était ainsi, préférant la compagnie des livres à celles des vivants. Oh bien sûr, elle discute avec les autres, mais pas au point de s'y attacher véritablement, elle est ainsi, feuille portée par le vent qui s'arrête quelque temps, se pose délicatement en un endroit avant de repartir comme elle est venue, toute tournée vers sa prochaine destination.